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Le Rap, ce révolutionnaire devenu Roi

Le Rap, ce révolutionnaire devenu Roi

Rap révolutionnaire NewTone

En voilà, une théorie qui a du sens. Le Rap est parti de rien, maintenant il a tout. Découvre cette théorie avec NewTone.

“Qui prétend faire du rap sans prendre position?”

Scandée par Calbo du groupe Ärsenik il y a 20 ans de ça, cette question rhétorique sonnait comme la définition d’un genre musical revendicateur. On ne peut pourtant pas dire que les luttes politiques soient au coeur de ce mouvement musical.

Aux yeux d’un public non averti, les rappeurs d’aujourd’hui pourraient même paraître insouciants, voire superficiels. On va se tourner vers l’Histoire pour comprendre ce qui s’est passé.

Le rap chante la vie

Aussi loin que l’on puisse remonter, ce genre a toujours trouvé son inspiration dans le quotidien. Au même titre qu’un Kendji ou qu’un Gainsbourg, le rap chante la vie.

On y parle des réussites et des difficultés ainsi que des joies et des peines, de la famille et des sentiments. Seulement, les rappeurs ont parfois des vécus différents de ceux que l’on entend dans les genres les plus populaires. Ils sont donc amenés à raconter et à montrer un mode de vie que les médias ne montrent que d’un oeil.

Pop ou Hip Hop ?

Ce “vécu de poissard” n’est pas dans Plus belle la vie mais il colle à la peau d’une grande partie du pays.

Une autre partie y est simplement sensible, que ce soit moralement ou musicalement. Aucune raison, donc, que le rap et ce qu’il véhicule ne finissent pas par être acceptés dans la culture populaire française.

N°1 des streams

D’ailleurs, les chiffres du streaming ne laissent plus de place à ceux qui qualifiaient cette musique de “sous-culture”. Sa capacité exceptionnelle à évoluer et à se diversifier l’a hissé au rang de première musique en France. Or, qui dit diversité dit différence, voire opposition.

Compétition VS Communauté

Le problème est que l’esprit hip-hop est paradoxal: à la fois fédérateur et compétitif, universel et sectaire. Or, une partie du rap est devenue mainstream en empruntant ses codes à la pop.

Même si c’est une concession que certains rejettent, légèreté des lyrics et ouverture musicale ont porté le rap à un autre niveau. Cela ne dénature pas son ADN pour autant. Dosseh en est le meilleur exemple : son titre Habitué cumule des dizaines de millions d’écoutes. Il a pénétré la sphère pop sans forcer alors que le reste de son album porte une empreinte très street.

Simple, basique

C’est aussi basique qu’un son d’Orelsan: s’élargir, c’est aussi s’adapter, se conformer.

Ce n’est pas étonnant que le côté résistant du rap se soit progressivement dissipé. Au premier abord, le feu lyrical du NTM semblerait presque éteint.

Baise le 6-tem ?

La réalité, c’est simplement que les rappeurs les plus écoutés actuellement assument pleinement leur côté capitaliste. Ils ne veulent plus être des rebelles, ils veulent amasser des sous en touchant un public plus large.

Le système aurait-il réussi à faire taire la dissidence par l’appât du gain? Comment en est-on arrivés là?

L’expansion du rap : le glaive ou le Trône?

Commençons par le commencement. À la fin des années 1980, les premiers groupes de rap portaient, plein d’espoirs, des revendications fortes à l’encontre du système. Ils déploraient que celui-ci génère misère et ségrégation sociale. Quelque part, ils rêvaient de changer le monde avec leur musique.

La lutte finale ?

Aujourd’hui, comme prédit par Fabe et Dany Dan en 1995, rien n’a changé à part les saisons. Trop pragmatiques pour continuer de lutter, beaucoup ont fini par céder à l’attrait du billet violet.

L’émancipation par la richesse finit par plaire plus que la lutte sociale. On n’hésite plus à glorifier la luxure et la consommation. Cette tendance s’accompagne assez logiquement d’un assouplissement des règles du game.

Parfois, l’extravagance a donc remplacé l’authenticité, les queues de cheval ont remplacé les boules à Z, les Lamborghini ont remplacé les Golf GTI. Si on s’arrêtait là, on pourrait dire que la Grande Époque du rap revendicateur est terminée. Que le rap, c’était mieux avant.

Dire qu’IAM, c’est mieux que 13Block, c’est tout aussi absurde que de dire que Franprix, c’est mieux que Leroy Merlin

Pour autant, c’est une erreur de considérer qu’il s’agit d’une baisse de qualité. On ne compare pas les Soprano aux Savastano : ce sont deux familles mafieuses différentes, évoluant dans des contextes différents. Dire qu’IAM, c’est mieux que 13Block, c’est tout aussi absurde que de dire que Franprix, c’est mieux que Leroy Merlin. On n’y trouve pas les mêmes choses parce qu’on n’y va pas pour les mêmes raisons.

Toujours pareil…

Remettons donc les choses dans leur contexte. Pour les nouvelles générations, le sombre constat est celui d’un ascenseur social qui est toujours bloqué au paradis. Les rappeurs ont fini par être véritablement las de ce retour au même schéma, pour reprendre les paroles de Joey Starr & Kool Shen.

Les escaliers jusqu’à la suite présidentielle

Du coup, ils prennent les escaliers avec l’intention de faire travailler les mollets jusqu’à la suite présidentielle. Pour l’instant, elle est occupée par Ninho, charbonneur de l’année 2018. Il a sans doute l’intention d’en profiter et de s’y montrer. Est-ce qu’on peut vraiment reprocher aux travailleurs victorieux de flamber un peu?

Tout va bien. Une entrecôte, un verre de vin.

Ninho – Binks to Binks 6

Le chemin qui mène à la victoire est long & sinueux

C’est surtout que le chemin qui a mené le rap où il est fût difficile. Dans leur course vers le succès, les rappeurs ont connu des lynchages médiatiques et des boycotts. Ils y ont répondu par des disques d’or obtenus en totale indépendance et par des tubes indiscutables comme “Désolé” de Sexion D’Assaut. Aujourd’hui, les disques de platine pleuvent et malgré certains signes, le rap porte toujours la marque de son Histoire.

Si l’on résume, les rebelles sont devenus princes. Or, bien souvent, lorsque les révolutionnaires accèdent au trône, ils abandonnent le glaive. Après une guerre de plus de 20 ans, le rap est sur le trône. Il est prêt à diriger d’un sceptre d’or diamanté.

Le Rap à la conquête de liberté

Alors d’accord, les rappeurs font loi, mais quel lien les unit encore? Qu’est-ce qui justifie que, malgré leurs différences, on puisse classer Damso, Kaaris et Nekfeu dans la même catégorie?

Une ambition hors-normes & une volonté d’être libres

L’équation semble difficile. Pourtant, il existe deux dénominateurs communs: une ambition hors-normes et une volonté d’être libre. L’ambition les a fait vaincre, elle a toujours été présente. En revanche, la liberté d’être soi-même est aujourd’hui bien mieux assimilée qu’auparavant dans le rap.

Nique les codes

Au cours de son évolution, le rap s’est affranchi des codes. Cela a permis de faire émerger des artistes extrêmement différents les uns des autres, sans pour autant les désunir aux yeux du public.

Cela a sans doute contribué à l’expansion du mouvement en lui permettant de parler à des groupes sociaux plus variés. Aujourd’hui, qu’on soit gothique ou skater, bourgeois ou prolétaire, banlieusard, provincial ou parigot, on peut s’identifier aux discours qu’on trouve dans la vaste arène du rap.

Maintenant, les rappeurs ont même le droit d’être tristes et d’aimer sans retenue, “à l’ammoniaque”.

Dabber en salopette argentée, c’est prendre position pour sa liberté.

Nouveaux riches, nouveau style

Non seulement dans le discours mais aussi dans le style, les règles sont en voie de disparition. Dans les clips, on va jusqu’à voir des simili-cirés jaunes (SCH – Otto), des Chuck Taylor (Lomepal – Club) et des vestes à paillettes (Hamza – Destiny’s Child). Interpréter un genre de Elvis Presley brésilien comme Sadek ou dabber en salopette argentée comme Lord Esperanza (Internet), c’est prendre position pour sa liberté, il n’y a pas de doute. Pour en savoir plus sur l’identité visuelle des rappeurs français, tu peux lire cet article !

VALD, auteur du morceau le plus streamé en 2018 sur Spotify, explique d’ailleurs à Rachid Majdoub pour Konbini, qu’il ne rêve que de liberté. Finalement, la liberté d’expression qui a marqué les premières années du rap s’est élargie.

Le rap est toujours conscient

Attention: la conscience du rap n’est pas morte pour autant. Il y a toujours des rebelles comme Médine ou Kery James qui tirent des balles lyricales sur l’Elysée.

Même de véritables stars comme Orelsan, Damso ou Nekfeu distillent des punchlines politiques pour éveiller leurs auditeurs. Ils sont la preuve que la culture de résistance propre au rap ne s’éteindra jamais à la lumière du succès.

Ainsi, et quoi qu’en disent les puristes, les Yann Moix ou les Eric Zemmour, le rap s’est imposé à la tendance tout en restant dans la bonne direction. Ceux qui s’y opposent encore doivent se faire une idée: ils sont maintenant en minorité face à ce révolutionnaire devenu roi.

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